Il est possible que RAP et SAEIO partagent une vie symbolique en dessinant les exemples de ce qu’ils ont été de programmer à remarquer.
Nul raccord direct entre l’aptitude à comprendre le symbole et la capacité à l’exécuter. La production de formes pures est une expérience plaisante.
Ici le train, dans sa partialité, représente la catégorie entière ou le type idéal. Non pas un spécimen particulier qui pourrait être identifié à son modèle dans le « monde réel » mais conçu comme l’exemple principal. Ce prototype repousse ainsi les distinctions.
Le train est complètement colorié et occupe l’espace entier de la feuille, peu importe le choix du format de celle-ci. La feuille, elle, organise le cadrage, la vision, sur laquelle il est possible d’y déceler une fenêtre. Souvent remplie, saturée, même noircie, cette illusoire ouverture attrape l’œil, l’empêchant alors de trouver issu. Le regard peut, tout au mieux, constater le rapport vital existant entre cette représentation et le vécu des artistes. Rapport livré, sans plus de fioritures, par le biais de figures simples, géométriques, parfois même dénuées de contours francs, où seules les touches de feutres permettent de délimiter l’espace du dessin.
Si une ligne n’est qu’un moyen, un simple exercice au cours duquel on déplace sa main à travers la page pour voir quelle sorte de trace elle laisse, la différence entre l’espace clos tracé sur le papier et l’objet réel est immense. Il n’est pas question de dessiner ici d’après réalité, ils nous font la proposition d’une grille. L’espace de la feuille est le cadre et les lignes qu’elle contient, renforcent l’impression de regarder un paysage à travers une fenêtre. Tant que le cadre tronque arbitrairement notre vision d’ensemble, il ne nous échappe néanmoins jamais la certitude que le paysage continue au-delà de ce que nous percevons.
Alors, la séduction de ces images vient de ce qu’elles ont d’étrangères à la réalité, sa seule intrusion induirait leur destruction. Ces dessins relèvent, comme du reste, d’un élan créateur (ou vital ?). La seule détermination à remplir la feuille avec une efflorescence de symboles, offre un contraste frappant par sa gaieté, sa vivacité, son enjouement. Le feutre, lui, rend non seulement, quelque chose de la nature novice, inachevée, germinale mais, dans sa matérialité physique, il démontre l’impulsion, la brutalité, le geste en action.
RAP et SAEIO, sont doués d’une assez grande énergie pour être fidèle à la même pensée, assez hardis pour se mettre au dessus des lois, assez croyants pour accomplir innocemment le même dessein. Pour que rien ne manque à la poésie de cette histoire, tous deux, sont restés inconnus, bien qu’ils aient commis les plus grandes bizarreries que suggère l’imagination ; l’évocation d’une discipline régie par une horde de symboles pour l’affirmation de sa naturelle beauté.
Sandra Mezache